«J’avais besoin d’un nouveau départ dans ma vie personnelle
et professionnelle»

À 27 ans, Roxanne Frank va se lancer dans un nouveau défi passionnant la saison prochaine en rejoignant Nantes qui sera entraîné par Jan Basny. L’occasion de faire un point avec l’attachante gardienne de but alsacienne qui a traversé des moments très contrastés depuis le début de sa carrière.

Une vie de handballeuse professionnelle est faite d’étapes plus ou moins heureuses. De moments de gloire et de moments de doute. Mais l’important, en toute circonstance, est de savoir maintenir le cap dans son histoire personnelle. Aussi bien les jours de tempête que les jours de grand bleu.

Aujourd’hui, Roxanne Frank est pleinement engagée avec Saint-Amand où elle est arrivée depuis Paris en 2023. «Avec un objectif prioritaire, énonce-t-elle fermement. Le maintien en D1.»

«Je vais m’inscrire dans quelque chose de plus grand, dans l’histoire d’un club. C’est quelque chose d’inspirant»

D’ici quelques mois, son cadre de vie va changer. Celle qui a découvert le handball à Soultz avant de porter les maillots de Colmar et de l’ATH (Achenheim Truchtersheim Handball) va prendre la direction de Nantes. L’actuel leader de D2 réussit une parfaite reconstruction après la douloureuse liquidation judiciaire de la structure professionnelle des “Neptunes” il y a quelques mois.

«C’est un nouveau challenge pour moi avec un projet vraiment très excitant. Le club a connu des difficultés financières, il est descendu en D2, mais a gardé toute sa structure pour mettre les joueuses dans les meilleures conditions. J’ai beaucoup aimé l’état d’esprit et les ambitions affichées, mais aussi le côté humain. Au-delà de pouvoir redonner à Nantes sa place perdue, c’est le projet qui me parle. Je vais m’inscrire dans quelque chose de plus grand, dans l’histoire d’un club. C’est quelque chose d’inspirant. Soit l’équipe va pouvoir monter en D1 dans quelques mois, soit il faudra le faire la saison prochaine. Ensuite, l’objectif ne sera pas uniquement le maintien, il sera de ne pas se donner de limites.»

Ce projet arrive au bon moment pour Roxanne Frank qui a fréquenté le centre de formation de Besançon, où elle est arrivée en 2017, avant de signer à l’ESBF son premier contrat professionnel.

«J’avais besoin d’un nouveau départ dans ma vie personnelle et professionnelle. Pour continuer à avancer, pour continuer à progresser. La ville de Nantes respire le handball, ce sera une découverte, c’est toujours bien aussi d’évoluer dans un chouette environnement quand c’est possible. J’ai envie de faire partie de ça, de connaître autre chose, avec un autre statut. »

«C’est dur à vivre parce que les gens ne savent pas ce que tu traverses, à quel point ça touche ton quotidien aussi»

Il faut dire que Roxanne Frank est passée par des moments compliqués ces dernières années. Traversant de longues périodes sans jeu. Sur le bord. Dans l’attente. Dans le doute. En faisant notamment l’expérience douloureuse des commotions cérébrales.

«C’est une blessure qui ne se guérit pas comme ça. Il faut du temps, il faut s’écouter, avancer par petits pas. C’est une blessure que l’on ne voit pas. C’est dur à vivre parce que les gens ne savent pas ce que tu traverses, à quel point ça touche ton quotidien aussi. On est isolé parce qu’on ne peut pas trop sortir ou faire d’autres choses, le bruit fait trop mal, la concentration est difficile, on ne peut faire aucune activité physique au risque d’aggraver les symptômes. Personne ne peut réellement t’aider. Ce n’est pas comme un muscle qui se reforme, c’est une blessure qui se guérit avec le temps. Et parfois, on refait des pas en arrière.»

Avec bien trop de temps devant soi pour réfléchir. «On ne sait pas combien de temps ça va durer. On ne sait pas si on va revenir. Je me suis toujours dit que ce n’était pas envisageable de devoir tout arrêter, mais tu es obligée d’y penser. Cette hypothèse est au-dessus de ta tête parce qu’il est question de ta santé, de ta vie future, on ne connaît pas les impacts pour plus tard.»

«Je porte un protège-dents depuis que mon neurologue m’a dit que cela permet d’éviter un tiers des commotions»

Mais, avec beaucoup de caractère, Roxanne Frank est revenue en étant pleinement actrice de son retour.

«J’ai fait beaucoup de travail de visualisation. Je n’ai pas peur de reprendre un ballon, mais plutôt des conséquences, que cela peut te sortir du terrain pendant des mois. Je porte une sorte de collier venu des États-Unis, surtout, je porte un protège-dents depuis que mon neurologue m’a dit que cela permet d’éviter un tiers des commotions parce que ça absorbe une partie des chocs grâce à la contraction des muscles. Trop peu de gardiennes de but le savent et c’est dommage. C’est important d’en parler.»

«J’ai toujours dans un coin de ma tête de revenir en équipe de France. C’est quelque chose qui m’anime au quotidien, je travaille pour ça»

Désormais, celle qui avait aussi obtenu le Prix national de l’éducation en 2015 mettant en avant son double parcours de sportive et d’étudiante, veut renouer avec son prestigieux passé. Elle qui compte huit sélections en équipe de France A en ayant notamment participé au Mondial 2019 au Japon après avoir été championne d’Europe Juniors en 2017.

«J’aimerais gagner en stabilité sur mes performances. Et j’ai toujours dans un coin de ma tête de revenir en équipe de France. C’est quelque chose qui m’anime au quotidien, je travaille pour ça. Et c’est important d’être dans un projet qui pourrait me le permettre. Mais il faudra d’abord retrouver de l’efficacité dans mon but avant d’envisager de refaire un stage avec la sélection.»

«C’est là où c’est important de ne pas lâcher
et de continuer à croire en soi»

Ce serait en tout cas une magnifique façon de poursuivra sa route.

«Entre le centre de formation, le contrat pro et les sélections, je n’ai pas eu le temps de tergiverser. Les dernières années ont été plus difficiles. Et ce que je veux, c’est rebondir. Ma trajectoire, je l’ai méritée, j’ai travaillé pour, l’équipe de France était la récompense de tout ça. Mais c’est aussi quelque chose qui te met plus de responsabilités sur les épaules et quand ça va moins bien, tout est plus dur. J’ai parfois eu l’impression de m’éloigner de mes objectifs, car ta façon de voir les choses est différente. J’ai vraiment adoré vivre tout ça, c’est une fierté, mais cela m’a peut-être rendu moins patiente avec moi-même. Il faut gérer ses propres attentes et ce n’est pas forcément facile surtout quand des blessures viennent te freiner. C’est là où c’est important de ne pas lâcher et de continuer à croire en soi. Je l’ai fait une fois, il n’y a pas de raison de ne pas y arriver de nouveau. »

Désormais, riche de toutes ses expériences, de cette patine donnée par le temps, mais avec encore tout l’avenir devant soi, Roxanne Frank est prête à prendre un nouveau départ. Avec gourmandise et détermination.

En octobre 2014, Roxanne Frank avait 16 ans lorsqu’elle a pris place dans le but de l’ATH en Nationale 1.

Roxanne Frank en septembre 2015 à Achenheim avec son amie Ilona Kieffer et les maillots de l’équipe de France.

En décembre 2017, Roxanne Frank et Ilona Kieffer, alors au centre de formation de Besançon, étaient de passage à Truchtersheim.

En 2025, Roxanne Frank est prête à relever un nouveau défi.