En immersion avec les “Piraths”

Ce samedi, les “Piraths” du SATH (Strasbourg Achenheim Truchtersheim) recevaient l’équipe suisse de Winterthur (3e de son championnat) pour un match amical afin d’agrémenter d’un peu de jeu la longue trêve hivernale, surtout consacrée à la préparation physique.

Dans ce reportage, handbelles.fr vous emmène au cœur d’une préparation de match avec les joueuses et le staff du Strasbourg ATH.

Vous allez vivre chaque étape depuis l’arrivée au gymnase jusqu’à la fin du match en passant par la collation, la promenade et l’intimité du vestiaire.

Un immense merci à Jan Basny, à Louis Chaudeur, à tout le staff et à chaque joueuse du SATH d’avoir gentiment et généreusement accepté notre présence pour vous faire vivre cette expérience inédite.

C’est parti pour une plongée dans les coulisses…

🔔 Prise de contact
Le coup d’envoi du match est à 16h, les joueuses arrivent au gymnase par petits groupes avant 14h.

Louis Chaudeur, l’entraîneur-adjoint, installe la caméra pour capter les images du match, Jan Basny, le coach, passe le balai sur le terrain, tout le monde se retrouve pour se saluer et discuter un peu, Typhanie Perrin, Candice Maurin et Édouard Ott, eux, sont en pleine partie de Uno.

🔔 Collation et réunion tactique
L’horaire est inhabituel, alors la collation est légère, chacun pioche sur la table ce dont il a envie, café, jus de fruits, compotes, barres de céréales, bananes et clémentines sont à disposition. Léa Fargues, elle, arrive avec sa tasse de maté.

L’ambiance est détendue, joyeuse, Dalila Abdesselam présente le bonnet estampillé “Piraths”, les discussions tournent beaucoup autour des mésaventures de Lilou Begon qui s’est cassée le nez la veille à l’entraînement et qui a passé la soirée et une partie de la nuit aux urgences.

Büsra Isikhan, revenue de l’Euro qu’elle a disputé avec la Turquie, est présente, comme les joueuses blessées qui ne joueront pas, Lidija Cvijic, Lilou Begon et Agathe Clerc.

Au mur se trouvent deux affiches rappelant les consignes et les objectifs du match.

À 14h30, Jan Basny prend la parole, place le contexte, rappelle les objectifs discutés tout au long de la semaine.
«Nous ne sommes pas là juste pour jouer un match, nous sommes là pour le gagner… Vous êtes fatiguées mentalement, physiquement, mais il faudra se faire plaisir dans le jeu avec un enthousiasme contagieux, défendre nos valeurs, faire preuve de concentration et de rigueur… On a beaucoup travaillé, il faudra rendre une copie à la hauteur…»

Louis Chaudeur ajoute quelques points précis. «Il faut que l’on soit dans l’expression de notre projet de jeu défensif… L’idée est que l’on se mette en action, que l’on soit dans la prise d’initiative avec des valeurs de communion… Soyez bien concentrées, tranchantes, engagées…»

Une discussion collective permet de fixer les objectifs précis en commun, par exemple sur le nombre de pertes de balle, sur l’efficacité au tir, sur les combinaisons à jouer…

L’intensité monte progressivement, pour aiguiser la motivation, le moment se ponctue par un rappel, être au vestiaire 55 minutes avant le coup d’envoi.

On se sépare sur des applaudissements, il est 14h42.

«Avant chaque match de championnat, nous procédons de cette façon, mais en prenant un peu plus de temps, raconte Jan Basny. On se retrouve avec les joueuses à 17h45 pour un match à 20h, Louis et moi on arrive un peu plus tôt pour discuter ensemble avant leur arrivée et préparer les choses. Aujourd’hui, c’est un match amical, nous avons moins de données précises sur l’adversaire. Lors d’une journée normale, nous avons discuté ensemble toute la semaine des objectifs, de la tactique, de points précis à mettre en œuvre, ils sont inscrits sur un tableau qui est toujours avec nous, bien visible, pour être bien mémorisés. En général, Louis fait un point, parfois avec une courte vidéo, sur un aspect particulier du jeu de l’adversaire.»

🔔 Promenade
Les joueuses ont déjà posé leurs affaires au vestiaire, dans la foulée, elles partent pour une petite promenade. «C’est toujours la même, explique Dalila Abdesselam. Elle nous permet de croiser et de saluer tout le monde.»

Le moment est bref, un tour de parking autour du gymnase de Truchtersheim, pour se mettre en condition, discuter, se réveiller musculairement. C’est un trait d’union avant la suite.

🔔 Vestiaire
À 14h50, les joueuses se retrouvent au vestiaire, se changent, enfilent leur tenue d’échauffement, prennent le temps, pour certaines, de soigner leur coiffure. Le tout en musique et ça, c’est le domaine de Margaux Imhof qui s’occupera aussi du choix des morceaux qui seront diffusés dans le gymnase pendant l’échauffement.

L’ambiance a changé, les discussions sont brèves, chacune est déjà concentrée, effectue ses propres rituels, les gestes sont précis, l’espace est rare.

Au milieu se trouve une table de massage, Lætitia Schwartz, la kiné, est là depuis la collation et s’occupe maintenant des joueuses qui en ont besoin.

«Chaque joueuse remplit quotidiennement un RPE (Évaluation de la perception de l’effort), nous avons donc un retour précis sur chaque gêne ou douleur, on connaît l’état de sa fraîcheur musculaire, de son énergie mentale et physique, raconte-t-elle. Cela permet d’avoir le pouls de la joueuse et au niveau médical, nous avons une réunion chaque semaine pour en discuter ensemble et prendre les devants. Le jour du match, je suis donc au courant de tout ça et je sais déjà quoi faire. Certaines ont besoin de choses précises, pour d’autres c’est plus ponctuel. Je sais en tout cas si certaines ont besoin de strap, de contention, de massage. C’est un moment où nous n’avons pas beaucoup de temps, alors c’est important de ne pas se faire surprendre.»

On frappe à la porte du vestiaire, Jan Basny et Louis Chaudeur entrent, distillent sur un ton plus bref, plus engagé, quelques dernières consignes, tapent dans la main de chaque joueuse, on applaudit, on se réunit au centre du vestiaire pour le cri commun «1, 2, 3, Piraths» avant de rejoindre le terrain.

«J’ai minuté tout le protocole avant les matches parce que c’est important de répéter les mêmes gestes à des moments précis, raconte Jan Basny. Je rappelle toujours quelque chose à ce moment-là, au vestiaire, un point précis sur lequel être attentif. Tout le staff est là, on se tape dans la main. Les joueuses doivent êtres prêtes, en condition, pour aller s’échauffer. Aujourd’hui, ce n’est pas un match de championnat, le protocole, la présentation des équipes sont moins longs, en général, on va sur le terrain 55 minutes avant le coup d’envoi. Ensuite, chacun a sa mission, Louis s’occupe de la feuille de match, Édouard va prendre en charge le début de l’échauffement, Soufian (Moudni) prépare les bouteilles des joueuses et moi j’observe, je vais aussi souvent discuter un peu avec les arbitres.»

🔔 Échauffement
Là aussi, tout est préparé, minuté, encadré. Les joueuses commencent par marcher tout simplement sur le terrain en échauffant des zones précises, certaines sollicitent en douceur une épaule pour la préparer à l’effort. Ensuite, c’est Edouard Ott, le préparateur physique, qui entre en scène.

«Pour éviter les blessures et permettre aux joueuses d’être performantes, il faut monter progressivement en température, en intensité pour qu’à la fin, elles soient prêtes à se battre, explique-t-il. Il y a des gestes pour se réveiller musculairement, articulairement, pour s’échauffer avant de se rapprocher progressivement du handball. L’échauffement est construit d’une façon très précise, c’est toujours le même, avant chaque match, mais il change parfois d’une saison à l’autre. J’interviens sur la première partie jusqu’à l’échauffement des gardiennes pour qu’elles soient prêtes à aborder la phase suivante.»

« Il y a d’abord l’échauffement individuel, explique Jan Basny. Ensuite on se retrouve autour du banc, c’est à ce moment-là que je donne mon 7 de départ parce que ça va conditionner la suite de l’échauffement. En revanche, j’ai déjà dit au vestiaire quelle gardienne va commencer le match pour qu’elle puisse se mettre en condition. Ensuite, on passe à la mise en place, avec des phases de jeu à quatre ou à six.»

🔔 Bref retour au vestiaire
Quelques minutes seulement avant le coup d’envoi, puisqu’il n’y a cette fois pas de long protocole de présentation comme pour les matches de D1, les joueuses rejoignent le vestiaire au pas de course.

Elles enfilent leur maillot de match, le ton est vif, concentré, déterminé. «On va récolter les fruits de notre travail», martèle Louis Chaudeur. Les «Allez, allez, allez» fusent. «Concentration», répète Dalila Abdesselam.

Et un dernier «1, 2, 3, Piraths» au centre du vestiaire, au-dessus de la table de massage, avant de se lancer, une à une, dans la lumière du terrain.

🔔 Première période
Sur le terrain, tout se passe bien pour les “Piraths” qui proposent un match sérieux et engagé en respectant les points et les objectifs fixés lors de la réunion. Elles mènent 18-10 à la pause.

🔔 Mi-temps
Chacune retrouve sa place dans le vestiaire, Red Bull pour certaines, banane ou compote pour d’autres…

Malgré le score, pas de satisfecit, au contraire. Dalila Abdesselam prend la parole et propose à Lilou Begon, Lidija Cvijic et Agathe Clerc de donner leur avis sur la première mi-temps et chacune raconte sa vision des choses en insistant bien davantage sur les points à améliorer que sur ce qui a fonctionné. La discussion se prolonge un peu. «Il faut être plus dense», ponctue Dalila Abdesselam.

Après quelques minutes, Jan Basny et Louis Chaudeur entrent à leur tour. Le premier évoque des points précis, donne quelques conseils, «on est dans les clous de nos objectifs, restez sérieuses», termine Louis Chaudeur. «1, 2, 3, Piraths» et retour sur le terrain pour un petit ré-échauffement.

🔔 Fin de match
Le SATH a battu Winterthur (38-25), les joueuses se regroupent, Dalila Abdesselam dit quelques mots à ses coéquipières et tout le monde salue le public avant de signer quelques autographes et poser pour quelques photos, car ce jour-là, c’était aussi la fête de Noël du club. Chacune s’éparpille, discute ici et là.

Jan Basny fait le bilan. «On était très bien appliqué en première mi-temps pour remplir les objectifs fixés ensemble avant le match. La deuxième a été un peu moins tranchante surtout dans le repli défensif, mais pendant 45 minutes, il y a eu beaucoup de sérieux. Après quinze jours de travail physique très dur, c’est plutôt satisfaisant. Car c’est aussi une phase difficile pour les joueuses, nous avons poussé loin, jusqu’au bout de la fatigue, la préparation physique. Ensuite, nous aurons 19 matches à jouer, il n’y aura plus de place pour replacer un tel bloc de travail. Et nous pensons, au niveau du staff, que cela va nous servir pour la suite du championnat, même s’il n’y a que le terrain qui nous le dira.»

«Après les matches, je ne parle jamais aux filles ou vraiment exceptionnellement. Parce que quand on perd, on est frustré, parfois énervé et j’estime que ce n’est pas le moment, mais j’agis de la même façon quand on gagne. Il peut parfois y avoir une exception, mais jamais dans une situation négative, quand je le fais c’est pour dire des choses positives.»

🔔 Debriefing
Dalila Abdesselam, la capitaine du SATH revient sur le déroulement de l’après-midi.

«Dans notre groupe, les tâches sont réparties. Le jour du match, cela commence par le choix de la tenue d’arrivée, c’est Lidija (Cvijic) qui gère cela, nous arrivons toutes habillées de la même façon lorsque l’on joue à domicile ou à l’extérieur. Pour la collation, c’est souvent la plus jeune du groupe qui doit s’en occuper, c’est donc souvent Juliette (Demuth) en ce moment. Dans le vestiaire et sur le terrain, c’est Lilou (Begon) qui gère les choses pour faire respecter le timing de l’échauffement.

Quand on revient au vestiaire avant le coup d’envoi, j’essaie de trouver des leviers, quelques leitmotivs pour bien entamer le match et défendre nos valeurs, c’est en tout cas plus sur l’état d’esprit.

À la mi-temps, le staff nous laisse toujours un temps libre pour parler entre nous. Là, j’avais envie que Lilou (Begon), Lidija (Cvijic) et Agathe (Clerc) nous donne leur point de vue pour rebondir dessus, chacune est libre de prendre la parole, forcément suivant les caractères, certaines le font plus que d’autres. Je ne prends pas non plus forcément la parole, parfois il y a des discussions à deux ou à trois et quand personne ne parle collectivement, j’essaie de capter l’attention pour ouvrir le débat. En général, avant de retourner sur le terrain, je termine en rappelant nos valeurs et notre projet de jeu.

À la fin du match, quand on est toutes réunies en cercle sur le terrain, je dis quelques mots plus ou moins sympas (rires). Mais ce n’est pas forcément moi, cela peut être quelqu’un d’autre. C’est ça qui est bien chez nous, c’est que tout est participatif. On amène les gens à s’engager, on ne peut pas dire et ne pas faire.»

Louis Chaudeur, l’entraîneur-adjoint du SATH, revient sur le déroulement de l’après-midi.
«Avec Jan, les jours de match, on se retrouve toujours un peu avant les filles pour éventuellement préciser encore quelques points, même si en général on a déjà tout bien travaillé la veille, voire toute la semaine.

Le jour du match, ce sont plus des rappels, des points sur lesquels appuyer. Pendant la collation et après, on se répartit les choses à dire avec Jan. Lui, c’est plus le rappel du contexte, les attentes et moi plus sur l’aspect handball, des points technico-tactiques. Avant le briefing collectif, je m’occupe de celui, plus spécifique, avec les gardiennes. Dix minutes avant le coup d’envoi, je dis quelques mots rapides aux joueuses suivant les sensations vis à vis du groupe, je peux les piquer un peu, chercher à les motiver, en tout cas c’est adapté à ce que je ressens sur le moment, à l’instant T.

Pendant les matches, mon rôle est d’apporter mes sensations à Jan, lui a une vision plus collective, moi j’essaie d’individualiser, je lui apporte des infos et c’est à lui de trier. Je prends des stats pour connaître notre efficacité en fonction de ce que l’on joue, comment marquent nos adversaires aussi, pour voir si on est dans les clous à la mi-temps.»

🔔 Baisser de rideau
Tout est redevenu calme à Truchtersheim. Le terrain est désert, le vestiaire parfaitement rangé, la nuit est tombée depuis longtemps.